dimanche 17 juin 2012

IVième forum international sur l'Amérique Latine à Bercy

Amérique du Sud toujours à l'honneur le 25 mai - et toujours sans le Brésil cette semaine! - avec à Bercy le 4ième forum sur ce continent organisé par l'OCDE et la Banque Inter américaine de Développement.

L'idée de ce forum est de réunir une fois par an les acteurs privés et publics qui opèrent sur cette zone pour débattre sur la performance économique de cette région qui intègre aussi les Caraïbes.

Au programme après une introduction par le bondissant Angel Guerra secrétaire général de l'OCDE et le discours de Laura Chinchilla, Présidente du Costa Rica qui a présenté le modèle de développement harmonieux et respectueux de son pays devant la Ministre Fleur Pellerin qui représentait les autorités françaises, entrée dans le vif du sujet.

Après un consensus pour constater que les indicateurs macroéconomiques étaient plutôt encourageant avec des taux d'endettement qui feraient rêver les pays de l'OCDE, les intervenants soulignent l'accès à la démocratie qui aujourd'hui semble installée dans la majorité des Etats du continent sud américain. Cependant si les zones de pauvreté ont pu être éradiquées ces dernières années, le continent reste encore très inégalitaire dans la répartition des richesses même en s'appuyant sur des politiques d'éducation volontaires et un développement de l'accès aux infrastructures.

Avec 5 femmes à la tête des gouvernements sud américains les populations sont à 40% dirigées par un pouvoir plus que sensible à ces problématiques d'éducation et de sécurité comme le prouve la choix de croissance inclusive poursuivi depuis 30 ans par le Costa Rica. Ce dernier a choisi de consacrer 7% de son PIB à l'éducation, s'est engagé dans une politique d'énergie verte qui couvre 90% de ses besoins et permet d'exporter vers les pays voisins.

Certes le continent n'est pas encore stabilisé et semble toujours réaliser "un éternel saut mortel vers l'avenir" comme le disait Carlos Fuentes ancien ambassadeur du Mexique en France. Le Brésil comme le Mexique doivent faire face aux crises monétaires européennes et souffrent d'un manque de coordination régionale comme l'a prouvé le récent replis Argentin. Le Mexique qui veut sortir de l'ombre du Brésil, comme le Chili réforment leur structures pour aller vers plus de productivité. Le Ministre des Finances de la Colombie aussi présent partage l'engagement de son pays vers l'innovation, l'éducation, le pilotage fiscal et les réformes pour tirer au mieux profit pour les colombiens de l'avantage apporté par les ressources naturelles présentes dans leur sol. Enfin pour clôturer le premier panel, Ramon Fernandez qui représente le Ministère des Finances français en tant que directeur du Trésor, souligne que l'on peut apprendre  beaucoup des exemples proposés par le peuples d'Amérique du sud.

Michelle Bachelet ancienne présidente du Chili et maintenant directrice executive de United Nation Women a assuré la transition vers les débats sur le futur de la zone en rappelant comment l'amérique latine avec un meilleur accès des femmes aux responsabilités possède un potentiel de réussite supérieur à celui de l'Asie, qui perd des points de PIB en refusant l'accès aux postes de responsabilité et à l'éducation pour les femmes. Même constat pour l'Afrique du Nord, avec des statistiques de la FAO à l'appui, prouvant que la rentabilité des cultures augmente de 2 à 4% quand les femmes en prennent la responsabilité., en rappelant que dans plus de 100 États il existe actuellement des différences juridiques entre hommes et femmes qui freinent le développement et l'entrepreneuriat.
Le deuxième panel a été l'occasion de découvrir avec son premier ministre les problèmes de développement de Saint Kitts & Navis - au large d'Antigua une occasion de réviser sa géographie des Caraïbes - dont l'économie avec 50 000 habitants doit trouver un équilibre de développement entre tourisme et services autres que ceux offerts par des paradis fiscaux, après 300 d'économie fondée sur la canne à sucre dans une région souvent dévastée par les typhons. Et pour ces micro états se pose la question du financement des infrastructures comme celle de ce terminal passager pour attirer les croisièristes qui a déjà été dévasté et reconstruit deux fois. Avec une très faible population cet État ne peut faire le choix du Chili qui dans les années 90 a pris pour option de financer ses infrastructure par les fonds de retraite permettant ainsi d'éveiller la conscience politique et d'usagers des administrés. Imaginez si Vinci gérait les avoirs prélevés pour nos retraites et votre geste citoyen en passant au péage !
Un autre point de déséquilibre a été mis en relief: le financement difficile par le système bancaire des 80% d'entreprises moyennes qui opèrent sur la zone et actuellement ne sont pas servies en crédits, et plus généralement la capacité d'emprunt potentielle pour des populations beaucoup moins endettées qu'en Europe et aux États Unis.

Enfin le troisième panel s'est concentré sur les équilibres budgétaires et la fiscalité avec un point sur la réforme budgétaire en Urugay avec un objectif d'assainissement des finances publiques doublé d'une revue systématique des impositions. Certes la situation d'avant 97 exonérait d'impôt les professions libérales, les professeurs, les rentiers en concentrant l'impôt sur la consommation avec une TVA à 23% la plus élevée de la Région. L'augmentation des bases et la mise en place d'un nouvel impôt sur les particuliers a été réalisée avec un objectif d'éviter l'évasion fiscale, de limiter l'économie souterraine et de faciliter la tâche du contribuable en privilégiant la retenue à la source dans un période de croissance moyenne du PIB de 6.5% par an. Résultat, le taux de population en dessous du seuil de pauvreté est passé de 40 à 13% de la population et l'Etat a pu ramener le taux de TVA à 20%.

Car souvent ces États partent de faibles taux de pression fiscale aux alentours de 12% en Amérique centrale alors que le Brésil comme le Méxique sont déjà à 32% du PIB. Avec une meilleure productivité et des ressources en matières premières importante, les États d'Amérique du Sud possèdent donc de bons fondamentaux pour leur développement et des exemples comme la "borsa familia" au Brésil démontrent que le seuil d'extrême pauvreté dépassé, les familles souhaitent envoyer leurs enfants à l'école, recevoir l'eau potable et l'électricité, puis acquérir un frigo ... autant d'éléments qui rendent responsable pour accepter de s'acquitter des impôts si un véritable service existe.

Le témoignage du président de Business Council of Latin America a confirmé cette approche posant la question de l'emploi des impôts perçus sur les sociétés pour permettre d'obtenir des infrastructures compétitives au delà du business en matière de santé ou d'inclusion. De même l'amérique du sud possède l'énergie la plus chère du monde notamment au Méxique ce qui freine le développement des entreprises tout comme le difficile financement des entreprises moyennes.

Après cette matinée on peut constater la maturité affichée en terme de démocratie et d'acceptation de l'impôt et l'effet accélérateur du développement qu'est la hausse des matières premières dont regorge ce continent. Certes nous sommes dans un colloque international qui doit rassurer et encourager les investisseurs et une certaine volatilité peut impacter à moyen terme ce dividende de développement si les États ne profite pas de cette période faste pour se réformer et créer les infrastructures nécessaires ou moderniser les circuits de financement et de crédit des entreprises moyennes et des populations.

Mais avec des coûts de revient parfois plus bas qu'en Chine, l'amérique du sud doit pouvoir faire des progrès de productivité en ayant une meilleure maîtrise de ses coûts liés aux infrastructures ou encore proposer un tarif douanier plus prévisible et moins complexe pour attirer plus d'initiatives des entreprises privées car peu d'Etat pourront remplacer cette dynamique entrepreneuriale qui permettra la pérennité de ce cercle vertueux amorcé depuis quelques années. On pourrait donc se demander pour certaines entreprises qui veulent partir à l'international si finalement plutôt que l'Asie, l'Amérique Latine ne serait pas une meilleure carte culturelle et économique ?

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